Je ne dis pas 7 fois mais 77 fois 7 fois

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DIMANCHE 17 SEPTEMBRE

Lecture du livre de Ben Sirac le Sage

Rancune et colère, voilà deux choses abominables où le pécheur est passé maître. Celui qui se venge éprouvera la vengeance du Seigneur ; celui-ci tiendra un compte rigoureux de ses péchés. Pardonne à ton prochain le tort qu’il t’a fait ; alors, à ta prière, tes péchés seront remis. Si un homme nourrit de la colère contre un autre homme, comment peut-il demander à Dieu la guérison ? S’il n’a pas de pitié pour un homme, son semblable, comment peut-il supplier pour ses péchés à lui ? Lui qui est un pauvre mortel, il garde rancune ; qui donc lui pardonnera ses péchés ? Pense à ton sort final et renonce à toute haine, pense à ton déclin et à la mort, et demeure fidèle aux commandements. Pense aux commandements et ne garde pas de rancune envers le prochain, pense à l’Alliance du Très-Haut et sois indulgent pour qui ne sait pas.

Evangile selon saint Matthieu 18 21- 35

En ce temps-là, Pierre s’approcha de Jésus pour lui demander : « Seigneur, lorsque mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? » Jésus lui répondit : «  Je ne te dis pas sept fois, mais soixante- dix fois sept fois. Ainsi, le Royaume des cieux est comparable à un roi qui voulut régler ses comptes avec ses serviteurs. Il commençait, quand on lui amena quelqu’un qui lui devait dix mille talents. Comme cet homme n’avait pas de quoi rembourser, le maître ordonna de le vendre, avec sa femme, ses enfants et tous ses biens, en remboursement de sa dette. Alors, tombant à ses pieds, le serviteur demeurait prosterné et disait : « Prends patience envers moi, et je te rembourserai tout. » Saisi de compassion, le maître de ce serviteur le laissa partir et lui remit sa dette.

Mais, en sortant, ce serviteur trouva un de ses compagnons qui lui devait cent pièces d’argent. Il se jeta sur lui pour l’étrangler en disant : « Rembourse ta dette ! » Alors tombant à ses pieds, son compagnon le suppliait : « Prends patience envers moi, et je te rembourserai. » Mais l’autre refusa et le fit jeter en prison jusqu’à ce qu’il ait remboursé ce qu’il devait. Ses compagnons, voyant cela, furent profondément attristés et allèrent raconter à leur maître tout ce qui s’était passé. Alors celui-ci le fit appeler et lui dit : « Serviteur mauvais ! Je t’avais remis toute cette dette parce que tu m’avais supplié. Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ? » Dans sa colère, son maître le livra aux bourreaux jusqu’à ce qu’il ait remboursé tout ce qu’il devait.

« C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur. »

Arrêtons-nous quelques instants sur le dernier verset de la première lecture tirée du livre de Ben Sirac le Sage. Pour ce verset, certains exégètes ont une autre traduction qui est plus percutante : « Souviens-toi de l’Alliance du Très-Haut et passe par-dessus l’offense.

Il y a là une très belle définition du pardon, qui dit bien la réalité : on ne peut pas effacer une offense… les coups d’éponge n’existent pas, mais on peut « passer par-dessus », comme le dit Ben Sirac.

Après une blessure physique, on garde une cicatrice ; pour une blessure morale, c’est la même chose : rien ne pourra faire qu’elle n’ait pas eu lieu.

Rien ne pourra effacer la calomnie, le geste de mépris, les gestes de violence.

Le pardon consiste, non pas à ignorer le passé, mais à passer par-dessus ; à reproposer son amitié, sa confiance ; à accepter qu’il y ait encore un avenir possible. Le mot « par-don » veut bien dire cela ; il s’écrit en deux parties « pardon », c’est-à-dire par-dessus le don, par-dessus l’offense.

Combien de fois faut-il pardonner ? On en discutait beaucoup à l’époque de Jésus. Pierre, habitué à la folle générosité de son maître, n’hésite pas à voir large : « Dois-je pardonner jusqu’à 7 fois ? »

La réponse de Jésus volatilise la question : « Je ne dis pas 7 fois, mais 77 fois 7 fois ».

Sans doute Jésus fait-il allusion à un vieux texte guerrier que l’on trouvait dans la Bible et qui appelait à venger Lameck, un arrière petit-fils de Caen : il y est question de 70 fois 7 fois.

Au débordement de la violence, Jésus veut substituer le débordement de l’amour bien veillant.

Quel renversement dans les profondeurs humaines ! Sept était un chiffre de plénitude. Pierre croyait avoir fait bonne mesure. Soixante-dix fois sept fois, c’était la plénitude multipliée par la plénitude. Avec Jésus une attitude nouvelle dans les rapports humains vient d’apparaître.

Comment croire aujourd’hui que cette nouveauté est possible ? Une fois de plus, il nous faut regarder Jésus. Car avec lui le Royaume de Dieu fait irruption. Les pratiques, les habitudes, les logiques humaines en sont bouleversées.

Pour Jésus, nul n’est jamais trop loin de Dieu. Aucun homme, fut-il mort, n’est définitivement perdu.

Telle est la passion de Dieu pour l’homme. Relever l’homme tombé à terre. Lui redire sans cesse : qui que tu sois, aussi pauvre sois-tu, tu es aimé de Dieu, donc aimable et capable d’aimer à ton tour. Va, quelque chose est possible pour toi, ne désespère jamais.

La passion de Dieu, c’est de recréer sans cesse l’homme à l’image de son Fils bien-aimé, lui donner un cœur aussi généreux que le sien, un regard capable de s’émerveiller, de contempler, de discerner ce qui est bon pour l’homme, des mains pour construire, pour abattre aussi les murs de haine qui se dressent entre les hommes.

Dieu nous donne de marcher et de marcher encore, jusqu’à lui ressembler, lui qui ne sait qu’aimer et pardonner.

Devant la démesure, l’excès du mal, on ne peut opposer qu’une autre démesure, un autre excès, celui de l’amour et du pardon. C’est sur la croix que Jésus nous a ouvert ce chemin.

Ceux et celles qui pardonnent sont les guérisseurs de l’humanité.

Pardonner, c’est l’acte le plus puissant qu’il soit donné aux hommes et aux femmes d’accomplir.

Cette semaine, nous pourrions nous poser cette question : Quel premier pas le Seigneur m’invite-t-il à faire ?

En famille, entre frères et sœurs, entre parents et enfants, dans notre île, dans la vie professionnelle ou politique, quel premier pas pour ne faire qu’un avec Jésus ?

 Père Jean Lucas

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