Agriculture. Le défi des insulaires

Le Bréhatin François Letron devant quelques fruitiers exploités dans le GAEC à quatre dont il fait partie. (Photo Armelle Menguy)
Comment s’installer ou transmettre quand on est agriculteur sur une île ? Alors que la question sera débattue, samedi et dimanche, lors du Festival des îles du Ponant à Groix (56), un réseau agricole des îles atlantiques (RAIA) est né, sous l’impulsion notamment du Bréhatin François Letron.

Maraîcher légumier, arboriculteur et récoltant d’algues. En 35 ans, François Letron est devenu une vraie figure locale sur l’île de Bréhat (22). En bio et en circuit court depuis le début, il pense, à 58 ans, prendre sa retraite, et est passé sous forme sociétaire pour faciliter sa transmission. Car pour le paysan qu’il est, voir s’installer des jeunes sur les îles de la façade atlantique et faire en sorte que les exploitations existantes puissent passer le relais dans de bonnes conditions est devenu un acte militant.

L’exemple transposable de Bréhat

 

« La problématique sur les îles est qu’un bâtiment, s’il n’est pas bien classé en mode agricole, peut vite se transformer en vocation touristique ou en loft pour un particulier aisé. Le lucratif pourrait alors pendre le pas sur les produits de première nécessité, d’autant que les baux ruraux ne prennent pas en compte le mode d’exploitation, comme le bio par exemple et que les normes environnementales n’ont pas encore intégré l’approvisionnement local ; seuls les paysages et les sites sont pris en compte. Nous sommes donc dans des attentes sociétales face à des lois pas toujours très synchronisées ! », rappelle celui qui est le vice-président du tout nouveau réseau, présidé par Georges Birault, à l’île d’Yeu (Vendée).

Le Bréhatin François Letron devant quelques fruitiers exploités dans le GAEC à quatre dont il fait partie. (Photo Armelle Menguy)

« Pour nous, faire venir des produits du continent n’est pas un bon choix. Cela suppose un coût de transport, des prix plus élevés, des dépenses de carburant. Les circuits courts et le produire et consommer local sont à privilégier et c’est ça que nous mettons dans la balance, d’où la création d’un poste pour Naila Bedrani, ingénieure agronome, dès le mois d’octobre.

Elle a réalisé une étude sur nos enjeux et perspectives, comme sur les possibilités d’un développement de l’agriculture à Bréhat. Son travail synthétise les problématiques rencontrées sur toutes les îles ».

Un choix politique de la part des élus

 

À Bréhat, il y a 400 habitants à l’année pour 318 ha de terres agricoles et cinq agriculteurs. « Nous sommes dans une très bonne dynamique, avec des reprises et des installations qui se font depuis 2016, ce qui n’est pas le cas partout. Pour autant, sur l’île, tous ceux qui ont des envies agricoles ne trouvent pas de réponse face au nouveau plan local d’urbanisme. Ce PLU pourrait, par exemple, fragiliser les tunnels anti-froid et anti-humidité dans nos cultures de tomates, salades et autres légumes de ratatouille. Or, ils nous sont indispensables pour nos marchés et approvisionnements d’été, période durant laquelle on ne vend pas de choux, et le microclimat bréhatin, s’il nous préserve du gel, nous oblige quand même à avoir recours aux serres ».

Le réseau agricole des îles atlantiques est donc né de tout cela. Il compte près de 30 producteurs installés sur toutes les îles. Tous très motivés et militants autour de l’avenir de l’agriculture en territoire insulaire. Samedi, à Groix, une porte ouverte à la ferme d’Yves et Isabelle Guellou aura lieu à partir de 15 h ; un débat avec les acteurs du réseau agricole aura lieu à 17 h et, à 19 h, sera organisée une rencontre avec tous les maires des îles du Ponant sur l’existence même du réseau. « À Bréhat, en 2017, on avait déjà rencontré des élus. On les sait sensibilisés mais ils ont un choix politique à faire autour de nos microfilières et chaque île a ses spécificités », évoque François Letron.

http://arz.fr/index.php/2018/08/24/de-lile-darz-a-concoret-dur-combat-de-maraichers/
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