David Robo relève le gant

Municipales – David Robo : « La stratégie de LREM va laisser des cicatrices »

Maire de Vannes et candidat à sa réélection, David Robo a depuis longtemps claqué la porte des Républicains. Dès 2017, l’édile affichait son soutien au gouvernement et à Emmanuel Macron. Et en bon proche du Premier ministre Édouard Philippe, il était de ces maires de droite macron-compatibles régulièrement conviés à Matignon.

Ce soutien et cette proximité appréciés au sommet de l’État ne lui garantissent pour autant pas la tranquillité politique à Vannes. La République en marche a investi, contre cet allié de la première heure, un candidat pour 2020. Même si Édouard Philippe l’avait prévenu – « il n’y aura pas de totem d’immunité » aux municipales –, le locataire de Matignon a peu goûté à la méthode de l’état-major de la macronie à l’égard de David Robo, et les a même mis en garde il y a une semaine, lors du traditionnel petit-déjeuner de la majorité à Matignon : « Quand un maire fait un pas vers la majorité, on n’est pas obligés d’investir un candidat face à lui. Sinon, cela ne va pas pousser le maire en question à soutenir le président de la République. » Pour le maire de Vannes justement, la manœuvre des Marcheurs va laisser des traces…

Le Point : « Comment convaincre des maires LR de nous rejoindre si on les fait perdre ensuite en investissant un candidat face à eux ? » C’est Édouard Philippe qui a posé cette question aux caciques LREM. Avez-vous une réponse ?

David Robo : Non, pour la simple et bonne raison que cette question est interne à la majorité. Je n’en suis pas membre même si j’en suis un allié. Je n’ai pas soutenu Emmanuel Macron, Édouard Philippe et le gouvernement pour obtenir quelque chose en retour, mais parce que leur volonté réformatrice va dans le bon sens, parce qu’il faut moderniser notre pays et son administration. Je ne souhaite pas l’échec du gouvernement au même titre que la majorité, je crois, ni ne souhaite l’échec des villes. Chacun doit comprendre qu’entre l’État et ses villes, il ne peut rien y avoir d’autre qu’une relation de gagnant-gagnant. Édouard Philippe et moi avons cette sensibilité du quotidien, celui des maires concernés au jour le jour par les préoccupations de leurs concitoyens. Est-ce que des candidats qui n’ont jamais été élus et n’ont jamais eu de parcours d’élu local sont éloignés de ces préoccupations du quotidien ? Sans doute. On ne s’invente pas maire.

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Vous avez été dans les premiers à quitter Les Républicains en 2017 et avez régulièrement apporté votre soutien depuis à Emmanuel Macron. Imaginiez-vous que la macronie envoie l’un de ses candidats contre vous aux municipales ?

En réalité, cela ne me surprend guère. Les Marcheurs ont besoin de construire une histoire sur les territoires et puis, en démocratie, tout le monde n’a-t-il pas le droit de se présenter ? Ceci étant dit, on peut s’interroger sur la méthode, sur le fait de présenter des candidats face à ses alliés politiques. C’est ce que semble penser le Premier ministre, en effet. Édouard Philippe a dit que les municipales étaient un combat de rue. Je tiens à ajouter quelque chose : c’est un combat de rue avec les habitants de sa ville, et pas contre un candidat. Je n’ai pas envie de me positionner par rapport à La République en marche ou au Parti socialiste. Je n’ai de compte à rendre qu’aux Vannetaises et aux Vannetais, à personne d’autre.

Vous n’avez peut-être pas suffisamment prêté allégeance…

(Rires). Sans doute pas ! Je suis libre et indépendant et quand une politique va dans le bon sens, je la soutiens.

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On ne s’invente pas maire

Pourquoi n’avoir jamais sollicité l’investiture LREM ?

Je n’ai pas quitté un parti politique pour entrer dans une autre formation. Mon indépendance n’a pas de prix. Quand vous êtes dans un parti, vous devez la plupart du temps avoir le doigt sur la couture du pantalon, partager les positions qui sont prises au niveau national même quand elles ne vont pas dans l’intérêt de votre ville… Moi, je dis non merci.

Votre liste est-elle déjà composée ?

Pas encore. Il y aura des membres des Républicains, des gens de l’UDI et du MoDem. Dans ma majorité, je peux compter sur deux adjointes LREM, Hortense Le Pape et Anne Le Hennanff, qui ont rejoint Emmanuel Macron bien avant l’élection présidentielle. En septembre, nous allons mettre en place des groupes de travail pour la campagne qu’elles animeront.

Depuis le début du quinquennat, vous et les maires de droite avez multiplié les rendez-vous avec Édouard Philippe. Ne pas avoir d’adversaire LREM aux municipales n’était-il finalement pas l’objet de ces réunions ?

Trois fois non ! Quand Édouard Philippe a organisé ces déjeuners avec des élus issus de la droite, il nous l’a dit et répété : il n’y a pas de totem d’immunité ! On le savait très bien. Je n’ai jamais rien quémandé.

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Malgré tout, la façon dont la macronie gère ses amis politiques de la droite et du MoDem vous interroge-t-elle ?

Je croyais au début qu’il y aurait de nombreux « tickets gagnants » avec des maires sortants compatibles et des Marcheurs locaux, mais ce n’est visiblement plus la volonté de l’état-major de la macronie. Ces listes d’union auraient été la meilleure stratégie pour que LREM obtienne une majorité d’élus locaux et réussisse donc son implantation dans les territoires. Je suis intimement convaincu que LREM aurait eu plus d’élus en faisant des listes d’unions avec les édiles sortants. Visiblement, il ont pris un autre chemin. Or, en politique, on ne gagne jamais seul. Emmanuel Macron n’a pas remporté l’élection présidentielle tout seul. Au fond, je crois que la stratégie de LREM pour ces municipales va laisser des cicatrices qui peuvent être longues à refermer. En 2021, il y aura les départementales puis les régionales, et je ne vois pas comment ils pourront appeler à l’union après avoir préféré les affrontements aux coalitions.

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