Les Béatitudes

Heureux les simples d’esprit, Vitrail de Trittenheim, St. Clemens

Dimanche 29 Janvier

Lecture du livre de Sophonie 

Cherchez le Seigneur, vous tous, les humbles du pays qui faites sa volonté. Cherchez la justice, cherchez l’humilité : peut-être serez-vous à l’abri au jour de la colère du Seigneur. Israël, je ne laisserai substituer au milieu de toi qu’un peuple petit et pauvre, qui aura pour refuge le nom du Seigneur. Ce reste d’Israël ne commettra plus l’iniquité. Il renoncera au mensonge, on ne trouvera plus de trompette dans sa bouche. Il pourra paître et se reposer sans que personne puisse l’effrayer.

Evangile de Jésus Christ selon saint Matthieu.

Quand Jésus vit la foule, il gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent. ……………………………….

Alors ouvrant la bouche, il se mit à les instruire. IL disait :

« Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux !

Heureux les doux : ils obtiendront la terre promise !

Heureux ceux qui pleurent : ils seront consolés !

Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice : ils seront rassasiés !

Heureux les miséricordieux : ils obtiendront miséricorde !

Heureux les cœurs purs : ils verront Dieu !

Heureux les artisans de paix : ils seront appelés fils de Dieu !

Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux !

Heureux serez-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause moi.

Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux ! C’est ainsi qu’on a persécuté les prophètes qui vous ont précédés.

« L’appel à être heureux et le chemin du bonheur. »

Les Béatitudes sont l’un des premiers discours de Jésus. Il parle de manière très concrète. Son langage est fait pour toucher ceux qui sont pauvres de cœur, ceux qui se sentent persécutés, insultés, maltraités ou abandonnés. C’est un réconfort pour ceux qui ont besoin de justice, de considération et d’amour. Un rêve de bonheur habite le cœur humain. Dieu veut l’exaucer. Déjà, tout au long de la vie, nous en goûtons des bribes. Jésus veut faire de tous les chrétiens des gens heureux, voilà pourquoi, nous disons que l’Evangile est une « bonne nouvelle » et que la Bible est un livre d’espérance. Au cœur de la foi chrétienne, il y a une certitude : Dieu ne nous donne pas la vie pour la reprendre. Il est fidèle.

Jésus propose une nouvelle manière d’envisager les commandements de Dieu. Il expose le paradoxe dont parlait Paul aux Corinthiens dans la deuxième lecture de ce dimanche : le paradoxe de la sagesse de Dieu si contraire à la sagesse humaine. Les valeurs de ce monde exaltent la force, la puissance, la volonté, le désir personnel. Nos critères de réussite sont des critères «de guerriers » ; il s’agit de s’imposer, d’en imposer aux autres pour avoir l’impression d’exister. Et voilà que l’Evangile de Jésus vante les petits, les faibles, les humbles, ceux qui n’ont rien. Le message de Jésus dans sa forme provoque chez nous tous un peu d’étonnement. Chacun de nous, au fond de lui-même, se sent dérangé, ne veut pas y croire.

Faudrait-il pleurer pour connaître le bonheur, faudrait-il connaître le malheur pour être heureux ?

Grand est la malheur dans le monde. Journaux et télé nous projettent, à longueur de journée, des images de réfugiés, d’affamés, d’êtres souffrant pour de multiples raisons. Sans oublier les problèmes de la planète. Les sinistrés d’Haïti possèdent si peu de choses dans leur abri de fortune. Ils n’ont ni compte en banque, ni garde- manger, ni placards débordant de vêtements. Il y a des pauvretés toutes proches dans nos villes et nos campagnes : la solitude, l’isolement, le rejet…. Il y a la pauvreté de ceux qui sont endettés et ne tirent pas de leur travail de quoi vivre.

Le message de Jésus, avant d’être une ligne de conduite, un règlement à apprendre et à respecter, est avant tout une personne à rencontrer et à rendre présent dans sa vie personnelle. Cette personne, c’est Jésus, Dieu lui-même, que nous devons accueillir dans nos vies. Dieu est le Dieu des petits, des pauvres, des humbles, parce que Jésus rejoint chaque personne dans ce qu’elle est. Il est le pauvre de cœur, il est le doux.

C’est pour nous, aujourd’hui, que Jésus a donné ces Béatitudes. Elles nous indiquent les multiples chemins du Royaume : chacun de nous accueille le Royaume et contribue à sa construction avec nos petits moyens. Avant l’exil du peuple hébreu à Babylone, le prophète Sophonie tente de « réveiller » la foi d’Israël. Seule, une petite minorité l’écoute. Ce « petit reste » du peuple, c’est un peu nous aujourd’hui, les chrétiens du monde occidental. Comme cette « petite part » du peuple juif, nous avons à vivre une situation de croyants minoritaires dans un monde marqué par l’indifférence religieuse et le matérialisme. Il faut que nous devenions pauvres de cœur. Il ne s’agit pas de la pauvreté matérielle ni des valeurs humanistes. Il s’agit de prendre conscience vraiment de ce qu’être chrétien signifie : être un « pauvre de cœur » à la manière de Jésus. Jésus ne s’adresse pas à des privilégiés, son auditoire, ses disciples sont des petites gens pas forcément pauvres au sens indigent du terme. Mais les pauvres sont préférés de Dieu car il est bon. La pauvreté est une donnée complexe ; c’est tellement vrai que Matthieu qualifie ces pauvres de coeur ou d’esprit. Etre pauvre de cœur, c’est être disponible, faire confiance, accueillir la Bonne Nouvelle.

Ce ne sont pas les êtres d’exception qui manquent dans notre société, mais les êtres quotidiens, des êtres qui vivent les béatitudes dans leur comportement habituel, dans leur ordinaire. Des hommes et des femmes qui n’envisagent pas de possession sans partager avec les pauvres. Des hommes et des femmes qui refusent la force, qui demeurent aux côtés des affligés, des gens qui croient et pratiquent la paix. Et il s’en trouve partout, ils s’en trouve autour de nous. Bienheureux ceux qui sont attentifs et soucieux de donner non seulement de leur superflu mais aussi le meilleur de leur temps et de leurs talents. Bienheureux ceux qui ne peuvent s’endormir tranquilles le soir, sachant que des humains gèlent où se couchent le ventre creux, incapables de croire en des lendemains meilleurs.

L’apôtre Paul, qui annonça l’Evangile à des peuples non croyants, nous indique la voie : ne suivons pas les valeurs de puissance, de richesse du monde ; acceptons notre condition humaine et faisons de notre faiblesse, une force. Ce n’est pas en courant vers sa puissance perdue que l’Eglise redonnera au monde le goût de l’Evangile. Dieu est plus grand que notre cœur, plus grand que la conscience que nous en avons. Dieu s’est fait fragile en mourant sur une croix. Croyons à la chance d’une Eglise au service des pauvres.

Ce ne sont pas les êtres d’exception qui manquent dans notre société, mais les êtres quotidiens, des êtres qui vivent les Béatitudes dans leur comportement habituel. Des hommes et des femmes qui n’envisagent pas de possession sans partager avec les pauvres. Des femmes et de hommes qui refusent la force, qui demeurent aux côtés des affligés, des gens qui croient et pratiquent la paix. Il s’en trouve partout ; il s’en trouve autour de nous. Soyons de ceux-là.

D’après diverses sources.

Père Jean Lucas

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