Choisir la vie !

DIMANCHE 5 MARS

Premier dimanche du Carême

Evangile selon Saint Matthieu, ( 1, 1-11 )

En ce temps-là, Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le diable. Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim. Le tentateur s’approcha de lui et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. » Mais Jésus lui répondit : « Il est écrit : « l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »

Alors le diable l’emmène à la ville sainte, le place au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres aux anges, et : ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. » Jésus lui déclara : « IL est écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »

Le diable l’emmène encore sur une haute montagne et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire. Il lui dit : « Tout cela, je te le donnerai, si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. »

Alors Jésus lui dit : « Arrière, Satan ! Car il est écrit : C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte. »

Alors le diable le quitte. Et voici que des anges s’approchèrent, et ils le servaient.

Choisir la vie !

 

La lecture tirée du livre de l’Exode et le texte de l’Evangile selon Saint Matthieu que nous venons de lire, sont aussi étranges l’un que l’autre. Ils sont là, ils ont été choisis en raison de leur importance pour nous aider à bien commencer le Carême 2017. Ces récits peuvent nous inciter à nous mettre en marche. Mais faut-il encore bien les comprendre ! C’est ce que nous allons essayer de faire.

Le premier récit nous rapporte la tentation d’Adam et d’Eve.

L’auteur de ce texte n’a jamais prétendu faire une œuvre d’histoire. Dix siècles avant Jésus Christ, il cherche à répondre aux questions que le monde se pose, question que nous nous posons nous-mêmes : pourquoi le mal, pourquoi la mort. Pourquoi la difficulté de vivre ?

Pour répondre, il s’appuie sur une certitude qui est celle de tout son peuple : Dieu est bon, car Dieu nous a libérés de notre esclave en Egypte. Dieu nous veut libres et heureux Mais alors, avec ce Dieu qui est bon et bienveillant, comment se fait-il qu’il y a du mal, des guerres, de la souffrance, la mort ?

Eh bien nous dit ce théologien de la cour du roi Salomon, vouloir manger à tout prix du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, c’est douter de la bienveillance de Dieu, c’est introduire le soupçon dans la relation avec Dieu, c’est vouloir se construire seul, sans Dieu.

C’est vouloir être maître de sa vie et choisir ce qui rend heureux ou malheureux.

Qui d’entre nous ne se reconnaît pas dans cette manière de conduire sa  vie ? En usant de notre liberté, nous sommes soumis à la même tentation. «  Pourquoi ne pas faire ce que j’ai envie de faire, ça ne regarde que moi. «  « Qu’ai-je besoin d’un autre, Dieu, pour orienter ma vie ? » « Qu’ai-je besoin des autres ? » « Je ne suis pas sûr qu’il y ait une autre vie après la mort. Aussi je profite de la vie et me laisse convaincre par les idolâtries matérialistes qui me disent : sois le plus beau, le meilleur, le plus dur, le plus efficace, le plus riche …. »

Il faudrait en dire plus… mais passons au deuxième récit.

C’est le passage de l’Evangile selon saint Matthieu qui nous rapporte la tentation de Jésus au désert.

Si tout homme est comme Adam, tout homme peut être comme le Christ. Dieu a voulu que vienne un autre Adam, comme nous le dit Saint Paul.

Avant qu’il ne commence sa mission, Jésus est allé au désert pour prier. Et voici que le tentateur se présente encore. A Jésus qui veut vivre sa mission en accord avec la volonté de Dieu son Père, le tentateur insinue : «  C’est à toi de décider, puisque tu es le Fils de Dieu. »

« Fais que ces pierres deviennent du pain : »

« Jette-toi du sommet du Temple. Déploie ta puissance, éblouis les foules ! »

« Adore-moi. Alors tu auras tous les royaumes de la terre, tu pourras les gouverner ! »

Pour Jésus qui voulait créer un monde nouveau de justice, d’amour et de paix, faire advenir le Règne de Dieu sur toute la terre, le plus simple n’était-il pas de prendre le pouvoir, en donnant du pain à manger aux foules, des exploits à admirer, un chef à adorer ? Beaucoup attendait que le Messie se présente comme cela, qu’il fasse des prodiges. Jésus n’a pas voulu. Pour contrer le tentateur, il s’adosse à la volonté de son Père : « l’homme ne mange pas seulement ce pain-là…. mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »

Pour Jésus la toute-puissance, c’est l’amour de son Père et des hommes ses frères.

Là où le premier homme a cédé à la tentation, le deuxième Adam, Jésus le Christ,  a résisté à la tentation : c’est ainsi qu’il a ouvert aux hommes un chemin de vie.

C’était le deuxième récit. Mais il y a un troisième récit dont il faut parler. Il nous concerne tous, puisque c’est nous qui devons l’écrire pendant ce Carême 2017.

La première tentation que nous rencontrons vient de la faim, de la peur de manquer de ce qu’il nous faut pour subvenir à nos besoins. Dans notre société de consommation, on nous invite à manger, consommer, gagner toujours plus, satisfaire au plus vite nos besoins immédiats.

La deuxième tentation est celle de l’apparence, de la vantardise par tous les moyens. Se croire maître de la vie. Continuer à polluer la planète sans songer aux générations futures, se lancer sans réserve dans des expérimentations sur le génome humain…

L’enjeu de cette deuxième tentation, c’est de se reconnaître fils et filles de Dieu recevant gracieusement la vie comme un don, un cadeau précieux.

La troisième tentation est celle de la puissance…. « Domine les autres ». L’enjeu de cette tentation, c’est de vivre en frère, en alliance, sans esprit de domination.

Tout au long de ce Carême, nous allons entendre Jésus nous parler, non pas d’abondance mais de partage, certainement pas d’apparence mais d’humilité, encore moins de puissance mais de service. A nous de décider si nous voulons suivre ce chemin de vie. C’est surtout cela le Carême.

 Père Jean Lucas
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