L’île aux Moines ne veut pas devenir Porquerolles

Intéressante itw du maire de l’île aux Moines qui pose bien les termes d’un choix de modèle de développement pour les îles du golfe du Morbihan

Ph. Le Bérigot. Ne pas devenir Porquerolles 

Comment se déroule la saison ? 
D’après les renseignements pris sur la fréquentation à l’office de tourisme, on a un tassement en juillet. Entre 10 et 20 %. Peut-être est-ce l’effet d’un système de comptage qui a changé avec un nouveau logiciel. J’ai l’impression tout de même qu’il y a moins de monde. Pour autant, les commerçants sont contents.

À combien s’élève la population de l’Ile-aux-Moines l’été ? 
J’estime qu’à cette époque, on doit être à 5.000 – 6.000 personnes à dormir, alors que notre population Insee est de 615 habitants. La base pour le dire, ce sont les 900 résidences secondaires et les 300 résidences principales, qui sont généralement pleines. S’y ajoutent le centre de vacances, le camping, l’hôtellerie.

Vous avez également un gros afflux de visiteurs occasionnels ?
Cet afflux est variable, de 1.000 à 3.000 personnes par jour. On peut monter parfois à 7.000 personnes. Le plus fort, c’est entre le 15 juillet et le 15 août. On a un chiffre qui date, mais on considère qu’il y a 450.000 passages par an, Ilois compris.

Comment faites-vous face ? 
Au niveau de la collectivité, il faut que l’île soit propre. Mais les difficultés que nous avons, ce sont des difficultés de cohabitation. La particularité du visiteur insulaire est qu’il croit que tout est possible. On limite à présent la circulation au port pour éviter les accidents. On a des interventions de bobologie suite à des chutes à vélo.

Combien de vélos sur l’île ? 
Honnêtement, je ne le sais pas. On a quatre loueurs. On peut dire que les vélos sont par centaines. Sur ce point, ce qu’on essaie de faire, c’est de communiquer pour inciter au port du casque.

Une des particularités, c’est aussi le nombre impressionnant de carrioles ? 

On a la « karrigel » îloise dans laquelle on met les bagages. On a aussi la carriole pour le transport des enfants. Là aussi, on attire l’attention sur les mesures de sécurité. Dans tous les cas, entre piétons et cyclistes, il faut savoir partager l’espace.

Sans compter les scooters ?


Je m’opposerai à ce qu’on puisse un jour louer des scooters, qui se justifient en revanche pour les résidents. L’Ile-aux-Moines n’est pas bien grande, elle fait tout de même 6,5 km de la pointe nord à la pointe sud.

Et pour les voitures ?


Elles ne sont pas les bienvenues et on voudrait plus de voitures propres. Trois voitures électriques ont récemment été acquises par des commerçants et artisans. La commune va acheter aussi un véhicule électrique. Dans tous les cas, il est hors de question d’élargir les routes.

Vous avez affiché une mise en garde contre certains comportements, notamment liés à l’alcool, et chez les jeunes ? 
C’est l’ancien prof qui s’exprime là. L’insularité est synonyme, chez certains, d’absence de limite. Il ne faut pas demander à la commune et à la gendarmerie d’endosser la responsabilité qui incombe aux parents. Ce mot s’adresse surtout aux parents. Il n’est pas normal qu’à 5 h du matin, il y ait des mineurs dehors. Et nous avons autre chose à faire que de rétablir la quiétude.

Y a-t-il encore des possibilités de construire ? 
C’est très contraint. L’île fait 315 ha, dont 154 sont préemptables par le Conservatoire du littoral, et on a 60 % de notre territoire en zones naturelles. Il reste peu. Un lotissement de dix maisons, dont deux en locatif, sera réalisé dans le bourg. Il faut faire en sorte qu’il y ait une population permanente dans un contexte de foncier cher. À l’Ile-aux-Moines, nous avons toujours eu une politique de logements. Sur 300 logements principaux, on compte 61 logements sociaux… Et depuis 2014, nous avons construit sur nos fonds six maisons pour la location.

L’île a la fibre optique, bien des communes pourraient vous envier ? 
Je crois en la possibilité de maintenir une population grâce à l’arrivée de jeunes qui font le choix d’allier qualité de vie et télétravail. Attention que nos îles ne deviennent pas des réserves à touristes. L’Ile-aux-Moines n’a pas vocation à avoir des boutiques de frites de juillet à septembre et de devenir Porquerolles. D’autant qu’on a une vie riche.
© Le Télégramme

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